lundi 8 juillet 2013

LES ANIMAUX VONT AVOIR DES DROITS

BIEN SUR CE N' EST PAS POUR DEMAIN.. MAIS ON Y VIENT ENFIN


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Livres Les animaux aussi ont des droits, analysent trois grands philosophes. Une démonstration qui montre qu’ils sont de moins en moins bêtes.
Un des phénomènes les plus marquants des dernières années est la montée en puissance des philosophes et éthologues qui évoquent la nécessité de donner des droits aux animaux. L’époque est définitivement terminée de l’animal assimilé à une machine, comme le disait Descartes, l’époque du philosophe Malebranche qui pouvait donner un coup de pied sur le ventre d’une chienne en disant que cela n’avait pas d’importance car l’animal ne ressentait rien.
Aujourd’hui, un consensus se fait : les animaux, au minimum ceux à sang chaud, peuvent souffrir, ressentir la douleur, exprimer des émotions et des sentiments. Et la cruauté dont l’homme s’est montré capable envers les animaux apparaît insupportable : élevages en batterie, mutilations des poulets et cochons, expérimentations sur les animaux, etc. Le livre sidérant de Jonathan Safran Foer sur l’élevage animal, "Faut-il manger des animaux ?", a ouvert beaucoup d’yeux.
Au niveau du grand public, on voit croître les adeptes du végétarisme et du végétalisme qui refusent désormais de manger de la viande car cela implique nécessairement qu’on tue des animaux. Aux Etats-Unis, le mouvement vegan croît, plus radical, qui supprime aussi le cuir, l’équitation, bref, toute forme d’exploitation de l’animal. Certains évoquent même le fait que notre civilisation revient sur l’acquis fondamental du néolithique qui fut de domestiquer les animaux à notre usage.

De nombreuses études vont plus loin que la seule compassion à l’égard de la souffrance animale et montrent que les animaux, du moins ceux qui nous sont les plus proches, ont une vie autonome, une singularité un caractère, une conscience de soi. Plus rien de fondamental ne distingue vraiment l’homme de l’animal. Depuis Darwin, on sait d’ailleurs que l’homme est un animal parmi d’autres et qu’il est plus proche des grands singes que les grands singes ne sont proches d’un ver de terre.
Tous ceux que ces questions passionnent doivent lire "Les animaux aussi ont des droits" où la journaliste Karine Lou Matignon interroge trois "stars" de ces questions : le philosophe américain Peter Singer, fondateur du mouvement de libération animale, la philosophe Elisabeth de Fontenay qui publia le bouleversant "Le silence des bêtes" et l’éthologue et neuropsychiatre Boris Cyrulnik. De longues interviews fouillées, pleines d’informations éclairantes et d’opinions parfois diverses.

Ainsi ces spécialistes se divisent sur la question du "spécisme". Peter Singer est un "antispéciste" qui estime qu’aucune espèce (ici l’homme en l’occurrence) n’a le droit de dominer les autres. Et pour lui, le combat pour la libération des animaux est le prolongement du combat de libération des Noirs, des femmes, des minorités diverses, qui tous, luttèrent contre la prétention d’une partie des hommes de pouvoir dominer les autres. Son antispécisme, refusant à l’homme une primauté en soi, peut avoir des conséquences éthiques délicates. Une question - théorique- est posée : s’il faut sacrifier un être vivant, qui faut-il choisir entre un homme réduit à l’état végétatif et sans espoir de guérison ou un grand singe qui garde toutes ses facultés cognitives et d’émotions ? Pour Peter Singer, il faut garder le singe.
Elisabeth de Fontenay est "spéciste". Pour elle, il y a eu un saut qualitatif avec l’homme, par le langage "performatif", qui peut impliquer une action, une action politique par exemple. Mais ceci étant dit, elle est tout aussi claire dans sa volonté de donner des droits à des animaux qui ne peuvent plus, en droit, être liés à des choses, des objets marchands. Ces animaux pourraient avoir des droits (sans devoirs) de "patients moraux" comme en ont les enfants ou les handicapés.
Ce combat législatif est très lent. Ce n’est qu’en 1963 que la cruauté sur un animal est devenue un délit et ce n’est qu’en 1997, par le traité d’Amsterdam, que les animaux ne sont plus rangés dans la rubrique "marchandises et produits agricoles" mais qu’on exige dorénavant "le respect des animaux en tant que créatures douées de sensibilité." Il a fallu bien du temps pour arriver à cela. Léonard de Vinci écrivait déjà qu’un jour viendrait où tuer un animal sera pointé du doigt et considéré tel un assassinat.
Le livre est riche de dizaines de citations frappantes. Telle celle d’Ovide qui disait : "Quel mal a fait le bœuf, cet animal sans ruse ni malice, inoffensif, ingénu, fait pour supporter les fatigues ? Oui, vraiment, c’est un ingrat, indigne des présents de la terre, celui qui peut égorger son laboureur à peine délivré du poids de la charrue recourbée, et frapper de la hache ce cou usé par le travail, après s’en être servi tant de fois pour retourner le dur terrain de son champ et pour préparer ses moissons". Ou Marguerite Yourcenar qui écrivait : "C’est déjà un gain immense de s’apercevoir que la vie n’est pas seulement incluse dans la forme à laquelle nous sommes accoutumés à vivre. Et, puis, il y a toujours pour moi, cet aspect bouleversant de l’animal qui ne possède rien, sauf la vie, que si souvent nous lui prenons".
Ou Lévi-Strauss qui a écrit : "En s’arrogeant le droit de séparer radicalement l’humanité de l’animalité, en accordant à l’une tout ce qu’il retirait à l’autre, l’homme occidental ouvrait un cycle maudit. La même frontière, constamment reculée, a servi à écarter des hommes d’autres hommes et à revendiquer, au profit de minorités toujours plus restreintes, le privilège d’un humanisme corrompu, aussitôt né, pour avoir emprunté à l’amour-propre son principe. "
Ce sont les soi-disant nécessités économiques, nécessités de l’expérimentation scientifique et les habitudes alimentaires qui s’opposent aux changements. Le livre pointe aussi le rôle du catholicisme. La question de la souffrance animale s’est, en effet, posée au Moyen Âge : les animaux n’ayant pas été chassés du paradis, ils n’ont pas la liberté de l’homme. Alors, si Dieu est bon et tout-puissant, pourquoi laisse-t-il les animaux souffrir ? La réponse fut claire : les animaux dès lors ne peuvent pas souffrir, par définition, sinon, ils nient en quelque sorte Dieu. Leur apparente souffrance n’est qu’un réflexe sans conscience. C’est sur base de cela que Descartes expliqua que les animaux n’étaient que des machines.
Guy Duplat

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