« Tous les animaux résolvent des problèmes auxquels
ils sont confrontés, ça leur suffit », explique l’ancien chercheur au
CNRS, Bertrand L. Deputte, invité lundi des Journées Nature, qui se
déroulent du 21 au 25 mai, salle Islea, à Avermes.
Spécialiste du comportement des primates Bertrand L.
Deputte, ancien directeur de recherches au CNRS, a enseigné l'éthologie à
l'école vétérinaire de Maison-Alfort.Le thème de votre conférence est "l'intelligence animale". En quoi un animal est-il intelligent ? En fait c'est un terme que l'on n'utilise pas parce qu'il est très connoté pour l'humain. On parle plutôt de capacité cognitive, terme plus large qui ne fait pas la différence entre intelligent et bête et qui comprend toutes les espèces animales y compris l'Homme.
Comment les chercheurs évaluent-ils les capacités cognitives des animaux ? Travailler sur leurs capacités cognitives, c'est travailler sur la façon dont ils perçoivent le monde et traitent les éléments pertinents du monde. L'univers d'un chien n'a rien à voir avec l'univers d'un humain. Ils perçoivent des choses que nous ne percevont pas et vice-versa. On prend en compte ces différences fondamentales.
Peut-on établir un classement des animaux ? Non, cela n'a pas grand sens. Tous les animaux résolvent des problèmes auxquels ils sont confrontés, ça leur suffit.
Vous êtes un spécialiste des primates. Ont-ils une intelligence singulière ? Plus vous avez un cerveau avec des connexions possibles, plus vous avez de chance de développer des capacités que les autres n'auront pas. Pour être simple, si vous avez un ordinateur qui a 2,8 kilos de mémoire et un autre qui a 2 tera, ce n'est pas tout à fait la même chose.
L'autre aspect, c'est que l'on va retrouver chez les animaux particulièrement sociaux plus de chances de développer des capacités cognitives.
Peut-on continuer d'affirmer que l'intelligence humaine est supérieure à celle de l'animal ? Elle est différente. Chez l'homme, la grande différence est d'avoir un système de communication aussi efficace et aussi particulier que le langage. Toutes les espèces animales communiquent mais il n'y a que l'humain qui parle et, la façon dont il parle, c'est le produit d'un certain nombre d'accumulations de capacités que l'on va retrouver ici et là chez les primates et qui a fini par émerger chez l'espèce humaine.
L'homme a une maîtrise du milieu qui n'appartient qu'à lui. On peut dire qu'il est supérieur mais je ne sais pas si cette supériorité est totalement maîtrisée vu que l'humain est capable de détruire tout ce qu'il y a autour de lui.
Un débat émerge en France sur notre rapport à l'animal, notamment dans l'industrie agro-alimentaire. Faut-il revoir la façon dont on traite les animaux ? On se donne aujourd'hui le droit de tout faire. Avant on tuait l'animal par besoin, l'homme était un prédateur comme d'autres espèces animales. Mais le tuer pour rien, je pense que l'on ne devrait pas. On devrait réfléchir à ce que l'on fait.
L'élevage permet d'accéder à des proies sans avoir besoin de chasser. C'est quand même quelque chose d'extraordinaire dans l'histoire de l'humanité. Ce qui est insupportable pour beaucoup de monde, c'est ce productivisme où on considère l'animal comme des petits pois. Il faut avoir un minimum de respect vis-à-vis du vivant.
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