mardi 10 décembre 2013

COLLOQUE DESANIMALISER DE L' ABATTOIR A LA VIANDE IN VITRO 5 ET 6 DECEMBRE UNIVERSITE DE STRASBOURG

SOURCE ET SUITE


ELEVAGE - Tuer les animaux est-il un crime ? Alors que notre société vit une crise de la mort animale dont le symptôme le plus évident est l'émergence des mouvements végétariens associés à une revendication croissante de droits pour les animaux, que faire face à l'industrialisation de ce qu'il est désormais convenu d'appeler la production animale ? Faut-il abandonner toute forme d'élevage, ou peut-on en imaginer un autre, et si oui selon quels principes ? Telles furent les questions posées lors du colloque "Déshumaniser, désanimaliser, de l'abattoir à la viande in vitro" organisé à l'initiative de la sociologue Jocelyne Porcher (INRA) et de la psychologue Marie-Frédérique Bacqué, les 5 et 6 décembre à l'Université de Strasbourg, avec le parrainage de la philosophe Elisabeth de Fontenay.
 
Une philosophe qui prévient d'emblée sur la contradiction qui l'anime. Malgré son engagement en faveur des animaux et la reconnaissance de leur sensibilité, Elisabeth de Fontenay se déclare incapable de franchir le pas d'un végétarisme éthique. Peut-on respecter l'animal tout en continuant à l'élever et donc à le tuer ? C'est bien dans cet interstice que les discussions se sont inscrites pour un dialogue sans fard auquel participèrent intellectuels, artistes, mais aussi des éleveurs principalement issus des mouvements paysans.
Conviés, les représentants des principales filières animales n'ont pas souhaité faire le déplacement. Dommage, car l'on aurait bien aimé connaître leurs opinions sur un abattage de masse qui s'est imposé comme le dénominateur commun de tous les élevages. De fait, les animaux d'élevage traditionnel ou extensif à mourir de leur belle-mort sont rares. L'immense majorité d'entre eux finit dans les mêmes abattoirs que les autres.
 
Si ces établissements étaient encore à taille humaine et locaux, voire communaux il y a quelques décennies, ils n'ont pas échappé à la rationalisation de leurs activités. Reflets de l'augmentation de notre consommation de viande, ils se sont organisés, mécanisés à l'image des abattoirs de Chicago qui inspirèrent, au début du XXe siècle Henry Ford et son travail à la chaîne. Objectif de ce système, la cadence, toujours la cadence, avec un impératif en tête: le rendement.
 
   
Misère(s) de l'abattage industriel
 
"L'industrialisation des abattoirs les a fait basculer dans l'horreur", déplore Jean-Luc Daub, auteur de Ces bêtes qu'on abat : Journal d'un enquêteur dans les abattoirs français. Stress animal, attente sans fin, mise à mort ratée, souffrance du personnel qui se répercute sur l'animal, en dépit des normes croissantes en faveur du bien-être animal, l'abattoir moderne, lieu de dissimulation de la mort, n'est pas en mesure de garantir à l'éleveur une fin digne pour l'animal qu'il a élevé.
"Je continue de faire des cauchemars, je suis hanté par les animaux" témoigne l'ex-enquêteur, se faisant écho de la projection d'un film Entrée du personnel. Son objet? Ces employés qui eux aussi font des cauchemars, eux aussi souffrent, consignés aux mêmes tâches, aux mêmes gestes, dans une logique qui rappelle qu'à ne considérer les bêtes que comme des machines, les hommes en font aussi les frais.
 
"La seule alternative c'est l'abattage à la ferme", affirme Sylvain (le prénom a été modifié). Eleveur de porcs de races rustiques, Sylvain abat ses bêtes avec l'aide d'un professionnel directement dans sa ferme. "Si l'élevage s'est bien passé, il faut aussi que ce soit le cas lors de la mise à mort," continue-t-il. Raison pour laquelle Sylvain s'est doté d'un laboratoire et de l'équipement nécessaire pour abattre et découper ses porcs, un choix autorisé par la taille modeste de son exploitation, qui lui coûte aussi plus cher. Mais, dit-il, "ça ne me pose pas de problème".

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