PAR HASARD JE TROUVE CECI. lE CONCHON N' EST PAS QUI ON CROIT.
Moi je les ai toujours trouvés sympathiques alors je ne peux qu' approuver.
source et traduction en anglais.Science: Manger du porc, c’est plus ou moins être cannibale (Bible confirmed by modern science: The swine ye shall not eat)
Alors l’ange de l’Éternel l’appela des cieux, et dit: Abraham! (…) N’avance pas ta main sur l’enfant, et ne lui fais rien … Genèse 22: 11-12
Qu’on ne trouve chez toi personne qui fasse passer son fils ou sa fille par le feu…Deutéronome 18: 10
Manasseh (…) fit passer son fils par le feu (…) et fit de plus en plus ce qui est mal aux yeux de l’Éternel. 2 Rois 21: 1-6
Vous ne mangerez pas le porc (…) vous le regarderez comme impur. Vous ne mangerez pas de leur chair, et vous ne toucherez pas leurs corps morts. Deuteronomy 14: 8
Pigs are more expensive to keep than rodents, and they reproduce more slowly. But the similarities between pig and human anatomy and physiology can trump the drawbacks. For example, their eyes are a similar size, with photoreceptors similarly distributed in the retina. (…) Geneticist and veterinarian Eckhard Wolf at the Ludwig-Maximilian University in Munich, Germany, has exploited the similarity between the human and pig gastrointestinal system and metabolism — like us, pigs will eat almost anything and then suffer for it — to develop models of diabetes. (…) Pig models are now being developed for other common conditions, including Alzheimer’s disease, cancer and muscular dystrophy. (…) Knowledge of the genome is also allowing scientists to try to engineer pigs that could be the source of organs, including heart and liver, for human patients. Pig organs are roughly the right size, and researchers hope to create transgenic pigs carrying genes that deceive the immune system of recipients into not rejecting the transplants. Nature
If consumers will accept it, they will produce it. So that’s where the issue lies. Dr. Forsberg
Le rejet de cet animal et tous les interdits qui l’accompagnent ne seraient-ils pas nés le jour où l’homme a découvert que la chair du cochon avait la même saveur que la chair humaine? Michel Pastoureau
L’ours et le cochon, eux, ont en commun l’ambivalence des sentiments qu’ils suscitent chez l’homme. Mais alors que l’ours a été admiré, vénéré puis dévalorisé, et même tabou, il y a toujours eu un mélange d’attrait et de rejet à l’égard du cochon, qui demeure encore aujourd’hui. Pour moi, cela vient de son cousinage biologique trop grand avec l’homme. Ne serait-ce que par sa morphologie interne, le cochon est très proche de l’homme. D’ailleurs on tire toutes sortes de produits médicaux du porc (beaucoup plus que du singe) : l’insuline, les glandes surrénales du cochon sont utilisées aussi, on lui emprunte des morceaux de peau… Les médecines antique, puis arabe médiévale le savaient déjà, et la médecine contemporaine le confirme pleinement : à l’intérieur, c’est tout pareil ! A tel point qu’on sait greffer des organes porcins sur des hommes. Une truie peut même être mère porteuse d’un embryon humain le temps d’une opération chirurgicale ! Je ne sais pas quels troubles psychologiques on garde d’avoir été dans le ventre d’une truie, mais ça s’est fait, au Canada. (…) J’ai l’impression que les tabous sont venus en partie de ce cousinage biologique que je souligne dans mon livre, et que la culture a donné d’autres explications. On a voulu expliquer l’interdit alimentaire présent chez les juifs et les musulmans en invoquant des hypothèses climatiques ou hygiéniques. Aujourd’hui, à peu près tout le monde y a renoncé : l’idée que dans les pays chauds, l’animal est considéré comme impur, donc tabou, parce que la viande de porc se conserve mal, ça ne résiste pas à l’analyse. Dans les mêmes zones géographiques, sous les mêmes climats, il y a des gens qui mangent du porc et d’autres pas. En revanche, l’hypothèse du cannibalisme paraît sérieuse. Les rares témoignages dont nous disposons de la part d’humains ayant mangé de la chair humaine soulignent tous que ça a le goût du cochon. Ce qui n’est pas étonnant puisque le patrimoine génétique commun est considérable. On dit toujours que c’est admirable dans le cas du chimpanzé, qui a 97% d’ADN commun avec l’homme, mais chez le cochon, c’est 95% ! M. Pastoureau
Certaines sociétés l’ont glorifié, d’autres l’ont rejeté comme impur. Wim Delvoye le tatoue. Pastoureau démontre que le cochon, même si le grand singe a un ADN plus semblable au nôtre, est bien notre plus proche cousin. On pille allègrement ses organes pour créer des dizaines de médicaments indispensables à l’homme, pour le foie, la rate, la thyroïde, les ovaires, le sang, etc. Il est aussi indispensable à la chirurgie humaine puisque son cœur et son foie peuvent être transplantés à l’homme. Pour Pastoureau, l’interdit à l’égard du cochon qu’on retrouve chez les musulmans et les juifs ne serait pas dû à des considérations hygiéniques mais à sa proximité même avec l’homme. D’autant que ceux qui ont goûté la chair humaine, lui ont trouvé un fort goût de porc (les « survivants des Andes » en 1972, par exemple). Bannir le cochon serait donc une façon d’interdire le cannibalisme avec nos frères ! La Libre Belgique
Comment, à la sortie du dernier numéro du magazine scientifique américain Nature confirmant la remarquable proximitié biologique du cochon et de l’espèce humaine comme toutes les possibilités médicales que cela laisse entrevoir, ne pas repenser à l’interdit multimillénaire et notamment biblique de la viande de porc?
Qui, comme l’avait bien montré dans un livre récent l’historien français Michel Pastoureau, avait très vite senti, pour ces sociétés à peine sorties du sacrifice humain, le danger de cette chair si proche de la chair humaine?
Nouvel Observateur
29-05-2009
Quelques semaines après l’alerte à la grippe porcine, l’historien des animaux Michel Pastoureau consacre un livre au «cousin mal aimé» de l’homme: le cochon. Entretien
Né en 1947 à Paris, directeur d’études à l’EHESS, Michel Pastoureau est historien, spécialiste des couleurs, des symboles et des animaux. On lui doit notamment « Bleu. Histoire d’une couleur » et « l’Ours. Histoire d’un roi déchu ».
Le Nouvel Observateur.- Qu’ont en commun l’ours, que vous avez étudié comme un «roi déchu», et le cochon?
Michel Pastoureau.- Avec l’histoire des couleurs, celle des animaux est une de mes spécialités. Et mes vedettes sont en général des réprouvés : j’ai écrit un gros livre sur l’ours après une dizaine d’années de recherches ; je m’occupe du cochon depuis longtemps ; j’ai aussi d’énormes dossiers sur le corbeau, autre grand réprouvé. C’est fascinant, le corbeau… Aujourd’hui toutes les expériences sur l’intelligence animale montrent qu’il pourrait être non seulement le plus intelligent des oiseaux, mais aussi des animaux – selon des critères humains bien sûr. Il est au niveau des grands singes. Les corbeaux font des choses inouïes : ils ouvrent une porte fermée à clé avec un fil de fer, qu’ils ont retravaillé ; ils ont de l’humour, et se moquent des autres oiseaux ; ils se reconnaissent dans un miroir, enfin, ce dont très peu d’animaux sont capables. Les sociétés antiques le vénéraient d’ailleurs, précisément pour son intelligence : on admirait sa mémoire, c’était un favori des dieux. Du coup, le christianisme médiéval l’a dévalorisé, et le folklore contemporain a pris le relais. Pauvre corbeau ! Il se venge désormais, avec ces expériences sur l’intelligence animale.
L’ours et le cochon, eux, ont en commun l’ambivalence des sentiments qu’ils suscitent chez l’homme. Mais alors que l’ours a été admiré, vénéré puis dévalorisé, et même tabou, il y a toujours eu un mélange d’attrait et de rejet à l’égard du cochon, qui demeure encore aujourd’hui. Pour moi, cela vient de son cousinage biologique trop grand avec l’homme. Ne serait-ce que par sa morphologie interne, le cochon est très proche de l’homme. D’ailleurs on tire toutes sortes de produits médicaux du porc (beaucoup plus que du singe) : l’insuline, les glandes surrénales du cochon sont utilisées aussi, on lui emprunte des morceaux de peau… Les médecines antique, puis arabe médiévale le savaient déjà, et la médecine contemporaine le confirme pleinement : à l’intérieur, c’est tout pareil ! A tel point qu’on sait greffer des organes porcins sur des hommes. Une truie peut même être mère porteuse d’un embryon humain le temps d’une opération chirurgicale ! Je ne sais pas quels troubles psychologiques on garde d’avoir été dans le ventre d’une truie, mais ça s’est fait, au Canada.
N. O. – Vous écrivez que «manger du porc, c’est plus ou moins être cannibale». Au fond, plus on a de répulsion pour le cochon, plus on s’en sent proche?
M. Pastoureau. – Il y a de cela, oui. J’ai l’impression que les tabous sont venus en partie de ce cousinage biologique que je souligne dans mon livre, et que la culture a donné d’autres explications. On a voulu expliquer l’interdit alimentaire présent chez les juifs et les musulmans en invoquant des hypothèses climatiques ou hygiéniques. Aujourd’hui, à peu près tout le monde y a renoncé : l’idée que dans les pays chauds, l’animal est considéré comme impur, donc tabou, parce que la viande de porc se conserve mal, ça ne résiste pas à l’analyse. Dans les mêmes zones géographiques, sous les mêmes climats, il y a des gens qui mangent du porc et d’autres pas. En revanche, l’hypothèse du cannibalisme paraît sérieuse. Les rares témoignages dont nous disposons de la part d’humains ayant mangé de la chair humaine soulignent tous que ça a le goût du cochon. Ce qui n’est pas étonnant puisque le patrimoine génétique commun est considérable. On dit toujours que c’est admirable dans le cas du chimpanzé, qui a 97% d’ADN commun avec l’homme, mais chez le cochon, c’est 95% !
N. O. – Ce cousinage biologique, observé depuis Aristote, se traduit également au niveau culturel dans l’Occident chrétien, où le porc est à la fois un don de Dieu – puisque que «tout est bon dans le cochon» – et une bête diabolique qui ne regarde jamais le ciel…
M. Pastoureau. – Oui, ce sont des auteurs du Moyen-Age qui l’ont observé. Il fouille toujours le sol, c’est signe d’un grand péché : ce qui se passe au ciel ne l’intéresse pas, donc il se détourne de Dieu selon certains médiévaux. Et cela permet de le comparer à l’homme pécheur, au mauvais chrétien. Ca paraît naïf, mais ça joue un rôle important dans la symbolique animale médiévale. Cela dit, certains textes sont également, à la même époque, très favorables au cochon. Tenez, la truie est une mère féconde, on ne peut pas la nier. Or tantôt on lui reproche de produire trop de porcelets par rapport au nombre de ses mamelles, donc d’être mauvaise mère ; et tantôt, on est admiratif, elle est signe de fertilité…
Car il y a aussi de la sympathie pour le porc, qui est presque instinctive chez les enfants. D’ailleurs rien ne ressemble plus à un nouveau-né qu’un porcelet…Le rapport entre le cochon et l’enfant traverse les siècles sous différentes formes : histoires d’enfants changés en cochon comme dans la légende de Saint-Nicolas ; enfants gardant les cochons, déjà tout petits, alors que pour garder les bovins il faut être plus grand ; jouets et friandises en forme de cochon… C’est un double, un parent, un frère, qui a été très présent dans notre vie quotidienne : pendant des siècles et des siècles, beaucoup de familles n’avaient pas d’autre animal qu’un cochon. Mais cette proximité à la fois biologique, matérielle et symbolique, c’est presque trop ! Du coup, cet élan de sympathie pour un cousin, s’accompagne en même temps d’un mouvement de rejet, probablement pour la même raison.
Aujourd’hui, il est possible que leur couleur blanc-rose, majoritaire chez les cochons européens depuis le XVIIIe siècle, leur nuise : c’est la moins aimée après le marron, comme le montrent les enquêtes d’opinion, avec des chiffres qui ne changent guère depuis un siècle et demi. Parmi les couleurs détestées, le marron arrive en tête, et tout de suite après c’est le rose. Chez les hommes encore plus que chez les femmes. Et devant le violet, à ma surprise. Globalement, le porc reste une créature des plus viles de la création, idée qui a permis de greffer sur lui toutes sortes de vices, qui se sont accumulés au cours des siècles.
N. O. – Comme la luxure?
M. Pastoureau. – Ah, c’est passionnant, car c’est très tardif. Pendant des siècles, le cochon ne fait pas de cochonneries. Il est glouton et sale – même s’il n’est en fait pas plus sale qu’un autre animal -, mais pas au sens sexuel. Symboliquement, c’est le chien qui fait des cochonneries. Or, quand il se revalorise entre le XVIe et le XVIIe siècle pour devenir le compagnon de l’homme que l’on sait, il faut le débarrasser de cette dimension très négative. On la déverse alors sur le cochon.
N. O.- Ce transfert symbolique du chien vers le cochon est si net que cela?
M. Pastoureau.- Oui. Dans certaines cultures, le chien garde d’ailleurs un reliquat de ces attributs, notamment dans le monde méditerranéen, où il reste perçu comme une créature impure – et infidèle contrairement à notre symbolique occidentale… C’est vraiment un transfert, dans lequel c’est le cochon qui reçoit tout. Il avait déjà beaucoup de vices, il en reçoit un nouveau, qui est considérable : quand on dit cochon, on pense cochonneries. Alors qu’avant on pensait plutôt gloutonnerie : c’est l’animal qui mange n’importe quoi, y compris des immondices, ce qui doit expliquer sa réputation d’impureté. Y compris ses propres excréments, éventuellement, si on ne le nettoie pas et s’il n’a rien à manger. En fait, c’est surtout un animal qui souffre beaucoup de son système de transpiration de la peau : il a donc besoin d’eau pour se rafraîchir ; s’il n’en a pas, il se roule dans la boue, mais toutes les expériences montrent, encore une fois, qu’un cochon placé dans de bonnes conditions n’est pas plus sale qu’un autre animal.
N. O.- Vous dites même qu’il préfère la propreté, et que c’est presque un gourmet?
M. Pastoureau.- Oui, d’ailleurs les cochons d’appartement sont propres si on les aide à se tenir propres. Le culturel et le symbolique ont ici un peu transformé l’image du cochon naturel. On voit par là que le sort qu’on leur réserve joue un grand rôle : dans certaines campagnes de France, il y a encore des cochons qui gambadent autour de la ferme, avec chacun sa petite maison… Je me souviens par exemple d’un voisin de mes parents, en Normandie, qui élevait une quarantaine de truies. Elles gambadaient dans les prés, elles n’étaient pas farouches du tout: dès que quelqu’un approchait, elles venaient le voir pour le cas où il aurait quelque chose à manger. Elles se laissaient caresser sans problème. Elles étaient propres. Et le plus fascinant, c’était le rythme de leur journée : elles se levaient et se couchaient à peu près en même temps que les humains, avec le soleil. Par rapport à leurs cousines de Bretagne, qui sont élevées en batterie, elles avaient la belle vie.
N. O. – Un porc médiéval disposait d’un hectare, contre un demi-mètre carré dans les élevages modernes. Cette destinée vous choque?
M. Pastoureau. – Ces élevages industriels sont terrifiants ! Et tout le monde s’en fiche. Oh, ça ne m’empêche pas de manger du porc. Mais, sans faire trop de sensiblerie, c’est un sort injuste fait à cette bête dont on sait qu’elle est un être pensant, qui compte parmi les plus intelligentes et qui est douée de sympathie, contrairement au mouton ; le cochon vient vers l’être humain, il est capable d’affection pour ses semblables comme pour son propriétaire. Pour l’intelligence, il est classé après le chimpanzé, l’orang-outang et le corbeau, puis l’éléphant et le dauphin. Prenez le chien et le chat, ils sont très loin dans ce palmarès. Et le cheval y apparaît comme un crétin fini ! Bien sûr, il faut faire attention, ces considérations-là sont des projections : c’est l’homme qui organise les expériences, qui observe le comportement animal, et c’est l’homme qui en tire les conclusions. Il faut être lucide là-dessus. N’empêche : vu les services qu’il rend, le cochon mériterait un meilleur sort. Celui-là renvoie de l’homme contemporain une image assez ingrate. D’autant que les grandes porcheries industrielles sont très mauvaises pour le sous-sol. Dans la région de ma grand-mère, dans les Côtes d’Armor, il y a quarante ans déjà, on ne pouvait plus boire l’eau du robinet.
N. O.- Dans l’imaginaire, le cochon est aussi lié l’opulence, comme le montrent par exemple les tirelires en forme de porcelet, ou même l’idée que « les bourgeois, c’est comme les cochons »…
M. P. – C’est exact. Juste avant la Première Guerre mondiale, il y avait même une mode des cochons porte-bonheur à travers toute l’Europe : des objets, des bibelots, des cartes postales que l’on s’envoyait. C’est retombé en France, mais en Allemagne ça dure encore, avec le commerce de cochons en pâte d’amande, et l’usage du mot «Schwein» comme synonyme de «Gluck», qui veut dire chance. Pour expliquer les tirelires en forme de cochon, au moins en partie, il faut sans doute se souvenir que tout au long de l’Ancien régime, on trouve l’idée que qui possède un cochon ne sera jamais pauvre.
Vauban a écrit un texte extraordinaire là-dessus, intitulé «De la cochonnerie», dans lequel il se livre à des calculs complètement insensés sur la fertilité des truies. Ca partait d’une intention extrêmement bonne : il s’agissait de lutter contre la misère de la population française… Moi qui suis historien du Moyen-âge, je suis toujours très choqué par une phrase comme «on se croirait revenu au Moyen-âge» chaque fois qu’il se passe quelque chose d’épouvantable. Car dans l’histoire des populations européennes, la période où on a été vraiment très malheureux, ce n’est pas le Moyen-âge, c’est le XVIIe siècle, avec la crise économique, politique, démographique, climatique… C’est le moment où l’espérance de vie tombe le plus bas. On vit moins longtemps sous Louis XIV que sous Saint-Louis ! Même la taille des hommes, des femmes, des animaux, tombe très bas. Et après, ça remonte au XVIIIe siècle. On pense toujours à Versailles, mais l’envers du «Grand siècle» est très noir, épouvantable. Pour les cochons aussi, sans doute.
N. O. – On est loin aujourd’hui du procès de la truie infanticide de Falaise, en 1386, cette histoire incroyable que vous aimez manifestement beaucoup…
M. Pastoureau. – C’est un record d’anthropomorphisme. Même si d’autres procès de ce type ont existé, ça n’est jamais allé, à ma connaissance, jusqu’à vêtir le cochon d’habits humains avant l’exécution, et inviter les paysans alentour à venir voir le spectacle avec leurs porcs pour que ça leur serve de leçon. C’est extraordinaire. L’idée était de donner une image exemplaire de la justice, en montrant qu’elle s’étend jusqu’aux animaux. Il y a eu des débats : des juristes, des théologiens aussi, pensaient que c’était complètement absurde. D’autres étaient d’un avis contraire. Cela a duré pendant plusieurs siècles, pour cesser au XVIIe. La fréquence de ces procès d’animaux reste un mystère. En cherchant beaucoup, on ne recense qu’une centaine de cas : sur trois siècles, c’est peu. Mais une chose est sûre : neuf fois sur dix, cela concernait des cochons…
Il y a une autre affaire qui me passionne : au XIIe siècle, le fils aîné du roi de France meurt d’une chute de cheval causée par un cochon. Or, pas de chance, il avait déjà été associé au trône et sacré roi. Cela semblait une mort absolument infâme, qui eut un grand retentissement à travers toute l’Europe. La monarchie capétienne était souillée par un cochon domestique, «porcus diabolicus» disait-on. Et je suis à peu près persuadé que le choix de la fleur de lys comme emblème royal est une purification de la monarchie capétienne à la suite de cet événément. Il a l’air complètement anecdotique, mais il a en réalité changé le cours de l’histoire de France : parce qu’au lieu de ce fils aîné, qui donnait naturellement de très nombreuses espérances, c’est le cadet qui est monté sur le trône, alors qu’il n’était pas préparé à son métier de roi. C’est Louis VII, dont le règne a été catastrophique… Tout ça par la faute d’un cochon… C’est une grosse affaire, en fait. Aucun historien n’en parle jamais… J’aimerais bien en faire un livre.
N. O.- Comment en vient-on à s’intéresser au cochon?
M. Pastoureau.- Je crois que ça remonte à la petite enfance à dire vrai. Et ma famille m’a fait observer que tout petit je collectionnais les bibelots en forme de cochon. Je ne saurais pas dire pourquoi. Dans mon bureau, il y a toujours des photos de cochon un peu partout…
N. O.- Heureusement, ça peut passer pour un outil de travail désormais…
M. Pastoureau.- Oui, c’est un alibi. Le cochon m’a toujours accompagné dans mon parcours, mais plutôt le cochon représenté ou imaginaire que l’animal vivant. Je suis un Parisien, j’ai fréquenté un peu la campagne, mais… Les couleurs aussi, ça me passionnait, j’ai grandi dans une pharmacie, il y avait plein de codes colorés… Et mon père avait des amis artistes peintres… Mais devenu étudiant puis jeune chercheur, j’ai eu le courage d’en faire mes objets d’études alors que ça paraissait très futile. Finalement, ce qui était un handicap a fini par devenir un atout. Mais ça remonte sûrement à la petite enfance, oui. Après, j’en ai fait des objets d’étude moitié par orgueil moitié par égoïsme. Je lisais des livres pour enfants avec des histoires de cochon, bien sûr, mais sinon pourquoi cet animal-là et pas un autre ? Je ne sais pas, je n’arrive pas à voir plus loin.
N.O.- Dans votre panthéon animal, c’est lui la star ?
M. Pastoureau. – Peut-être. J’ai pris un grand plaisir à écrire un livre sur l’ours, et à lui consacrer quatre ans de mon séminaire ; je pense que mes étudiants en gardent un bon souvenir. On s’est vraiment fait plaisir, en étudiant toute une série de documents étonnants. J’ai passé dix ou douze ans avec l’ours, mais le cochon, c’est plus affectif… C’est absurde. Est-ce que c’est parce que je viens de la France de l’Ouest et que c’est une terre de cochons? Non je crois que j’ai dû recevoir bibelots et cochons en peluche, ou quelque chose comme ça. Freud expliquerait sans doute ça très banalement.
N. O.- En tout cas, à vous entendre, imposer ce type de sujet a priori peu noble dans le champ académique a été difficile…
M. Pastoureau.- D’une manière générale, l’histoire des animaux, et du rapport entre l’homme et l’animal n’était pas un sujet sérieux : c’était de la petite histoire, qui n’avait rien à faire sur le devant de l’histoire savante. Et quand j’étais étudiant, et que j’ai choisi de m’intéresser au bestiaire médiéval dans ma thèse, ça semblait ridicule, indigne des travaux universitaires. J’ai dû lutter un peu, pour faire comprendre que ce n’était pas complètement absurde, et puis j’ai profité de ce que, dans les années 1970-80, les barrières sont un peu tombées entre les différentes disciplines : l’histoire, les sciences naturelles, l’anthropologie ont pu se rencontrer. Travailler sur l’animal d’un point de vue historique est devenu moins aberrant. Aujourd’hui, c’est accepté. J’ai eu les mêmes difficultés dans mon autre spécialité qui est l’histoire des couleurs. Quand j’ai commencé, ça semblait d’un futile ! Même en histoire de l’art. Et puis peu à peu, ça a changé. Ce n’est pas gagné, mais c’est quand même mieux qu’il y a deux générations. Jusqu’il y a 20 ou 30 ans, il n’y avait presque rien sur l’histoire des animaux. On l’a oublié, mais il y a 50 ans, des sujets aussi importants que l’histoire de l’alimentation semblaient indigne de l’histoire universitaire. Même chose pour l’histoire du vêtement, qui est pourtant quelque chose d’essentiel !
Et au sein du monde animal, évidemment il y a des sujets plus nobles que d’autres. Le cheval, c’est important, il a droit à de bons livres, mais le cochon… Si on prend le biais alimentation, métier de la boucherie, histoire économique et sociale, ça va. Mais pour l’histoire symbolique du porc, il faut encore être prudent !
Propos recueillis par Grégoire Leménager
«Le Cochon. Histoire d’un cousin mal aimé», par Michel Pastoureau,
Gallimard, Découvertes, 160 p., 13,90 euros (en librairie le 4 juin).
Voir aussi:
Genome will benefit farmers and medical researchers.
Alison Abbott
Nature
14 November 2012
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